" Je compte trouver mieux 
un peu plus loin " 

Harar 1885_ Arthur Rimbaud 

 

   

 

 

  


 
 

 

II - Réhabilitation :

Sa vie est  son oeuvre

 

 

Fulgurances

 

   Arthur, enfant, était (comment dire ?) "doué", et il rafla déjà entre l'âge de 11 et de 15 ans treize prix et neuf nominations au lycée, et ainsi triompha par un record de 36 prix en 5 années.

Ce rebelle précoce se paye le luxe en 1869, au concours de vers latins de l'Académie de Douai, qui dure de six heures à midi, de se faire apporter des tartines par le Principal, (intrigué de voir vers 9h que l'insolent prodige n'avait toujours rien écrit) ; avant de rédiger en moins de trois heures les 80 vers qui lui rapporteront le premier prix.

Vraiment, il semble que notre Arthur ait fait sien ce précepte énoncé plus tard par quelque intellectuel retors : " Quand on est artiste, il est préférable de faire ce qu'on a à faire avant de mourir, plutôt qu'après."

 Par la suite, afin de parfaire avec raffinement la matière malléable de sa psyché, il se paya un stage intensif ciblé vers l'humilité, dans les dernières années de sa fulgurante courte vie.

Bien qu'il soit plus difficile à un génie de se faire humble, qu'à un imbécile de se montrer fort en rhétorique, il y parvint ... Parce que, au bout du compte, que sont les simples écrits d'un jeune carolomacérien en face des "Ecritures" ? (Ces textes que l'on dit sacrés dans les religions monothéistes ; sûrement dans les autres aussi, d'ailleurs, par respect). Sous les frondaisons abyssines, en refermant l'un de ses livres au cuir usé, Arthur Rimbaud n'était certainement plus dupe.
Un des Psaumes chantés par David, ou des versets choisis du Coran ? Il avait le choix. Dans le haut-de-gamme. Si la puissance de toute oeuvre réside dans son caractère aisément universel, la force d'un auteur ne vient, finalement, que par sa faculté de se faire posséder ainsi par tout un chacun, intimement et en consciences réciproques ...


Son penchant pour ce qui relève de l'absolu, son jusqu'au-boutisme, s'était toujours mal accommodé des compromis. Et les religions sont des compromis. Mais on a tendence à faire presque toujours la confusion entre les anticléricaux et les athées, un vague amalgame de grandes gueules ou de mécréants. Mais n'oublions pas que les plus farouches adversaires du Pape et de ses institutions, au bout de leur schisme, en viennent parfois à créer leur propre Eglise, voire leur propre croyance (Luther en Allemagne, Calvin à Noyon, les Mormons etc. etc.) C'est dire qu'ils sont loins de se sentir éloignés de l'idée de Dieu ... Dans l'absolu ; pas dans les rituels. Comme Le Fulgur'.

 

 

 
  ... Un esthète prématuré ?  
 

   Notons que probablement l/3 seulement de l'oeuvre a pu être retrouvé.

La première grande flambée de rimbaldisme, malgré l'obstination de Verlaine qui fit publier " les Poètes Maudits " (Arthur Rimbaud + Stéphane Mallarmé + Tristan Corbière) puis les " Illuminations " (à l'insu de l'auteur), ne date que des années 30. Et il n'entre dans les universités et les manuels que dans les années 50, puis c'est à l'occasion du centenaire de l'oeuvre qu'arriveront les éditions correctes et à peu près complètes (incluant sa correspondance).

Ainsi sa notoriété, semble-t-il, ne fait que vraiment commencer, ces dernières années avec l'ère du livre de poche, de la télévision, et du multimédia ...

Arthur avait juste un siècle d'avance quand il écrivit "Voyelles" , poème sémiologique bouleversant, ou routine multimedium basique (...)

 

Pour ne prendre qu'un exemple, évident, Jim Morrison, le poète chanteur du groupe "The DOORS" (nom choisi en hommage à Huxley) reconnaît la profonde influence des écrits d'Arthur Rimbaud sur son travail et même sur sa vie (mais les deux sont confondus en poésie ...)

Ce français reste donc une référence aujourd'hui incontournable pour tous les Dylan de la Terre ...

D'ailleurs, de nombreux parallèles sont identifiables entre la trajectoire rimbaldienne et le mouvement culturel qui naquit dans les années soixante, entre les beatniks (50'ies) et les gauchistes (70'ies)*, celui de la "génération Woodstock" (les "freaks", les "hippies", comme on disait alors, ou les "babas", les "marginaux" comme on a dit plus tard). Les livres de Jack Kerouac (" Sur la Route ") en sont une preuve écrite parmi tant d'autres.

*(Le Fulgur' a comme qui dirait pris sa revanche en se réincarnant pour Mai 68 en Cohn-Bendit, ce jeune trublion ébouriffé, agitateur à l'écart des partis politiques et des syndicats, Gavroche ayant trouvé un porte-voix ...)

Oui, Arthur fut incontestablement un routard, (puis un homme de terrain farouchement jusqu'auboutiste) ...

Ainsi lorsque l'ami d'Arthur, Delahaye, nous raconte avec humour comment en 1871 Arthur "rassura" la population de Charleville en se faisant couper les cheveux, (qu'il avait longs jusque dans le dos); cela n'est pas sans rappeler la convocation de la presse par John Lennon et Yoko Ono, pour se faire tondre publiquement (en l'occurrence afin de militer en faveur de la paix au Vietnam).

Arthur pratiquait alors dans sa province l'art du graffiti, il était présumé être l'un des "taggers" de Charleville. (Son leitmotiv ? : "M. à Dieu") (= Mort, Merde, Merci, ou aMour ?)

 

Notons que cette même année 71, à 17 ans, il grandit de 20 cm en 9 mois (!) pour atteindre le mètre quatre-vingt qu'il devait garder. (Arthur-le-Fulgur' ... n'a jamais rien fait à moitié).

C'est aussi l'année où il a écrit " Le Bateau Ivre ", ce poème qui donna le roulis aux Parnassiens ...

 

Historiquement on sait maintenant que son travail constitue une charnière dans la poésie occidentale éditée. Le romantisme est derrière, le surréalisme se profile.

Plus récemment, quelqu'un comme Henri Michaux (" Connaissance par les Gouffres "), semble être l'un des poètes (peintre-dessinateur) qui appliqua le plus fidèlement les théories rimbaldiennes au travail d'écriture, ce "misérable miracle", comme il le définit ...

Mais l'on retrouve cette exploration chez de très nombreux auteurs, dont la plupart des occidentaux qui alimentèrent la philosophie de cette "beat-generation", puis de celles consécutives. On ne peut oublier Aldous Huxley (" Le Meilleur des Mondes ") qui expérimenta (à un âge "certain", vers la fin de sa vie, les psychotropes) (cf. " Les Portes de 1a Perception ").

Egalement Herman Hesse (" Le Jeu des Perles de Verre ", " Le Loup des Steppes "), à sa façon, illustra les maîtrises ou les dérèglements de tous les sens, et leurs correspondances reciproques.

Et le succès spirituel et éditorial de l'étudiant Castenada devenant sorcier et écrivain, initié par un indien Yaki, relève de la même quête de "voyance" ...

En France, un Jacques Prévert ou un Boris Vian transcendèrent aussi la poésie, en la montrant toujours vivante; mais la liste serait trop longue : tout ce qui compte en littérature au vingtième siècle est concerné ... Et le recensement des auteurs influencés par ce défrichage, (influence parfois inavouée ou même ignorée), donnerait un résultat exponentiellement croissant ...

 

 

 

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